Le MICA Center1 a publié, début janvier 2022, la troisième édition de son bilan annuel qui fournit une analyse de l’ensemble des menaces affectant la sûreté maritime dans le monde, étayée de statistiques détaillées et vérifiées.
Le centre d’analyse de la Marine Nationale constate durant l’année 2021 un recul du nombre d’actes de piraterie et de brigandage maritimes. Le nombre total d’événements dans le monde s’établit ainsi à 317, contre 375 en 2020, soit une baisse de 15%.
Cette diminution est particulièrement marquée dans le Golfe de Guinée (GoG), où le nombre d’incidents liés à la piraterie et au brigandage maritime est exceptionnellement bas, avec 52 événements relevés. Malgré tout, la menace que représente la piraterie dans la région reste majeure et, partout ailleurs dans le monde, les espaces maritimes font face à une recrudescence d’autres facteurs d’insécurité, tels que les trafics et la pêche illicites ...
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Le commandant du MICA Center, le Capitaine de frégate (CF) Eric Jaslin (EJ) nous livre son regard sur cette année 2021 : |
Le golfe de Guinée est une zone à haut risque pour les navires de commerce. Pouvez-vous nous présenter un rapide état des lieux de la menace et de son évolution récente dans la région ?
EJ : Les statistiques montrent une baisse notable cette année du nombre d’incidents de piraterie et de brigandage par rapport aux dernières années. En particulier on observe une forte baisse dans les eaux territoriales de certains pays.
Cependant, cette tendance mérite d’être confirmée sur la durée car elle n’a véritablement été observée que lors des six derniers mois qui ont montré une rupture par rapport à 2019 et 2020.
De plus, les actions violentes des dernières semaines avec plusieurs kidnappings (15 marins sont toujours retenus prisonniers à ce jour dans le GoG) sont la preuve que la menace est toujours présente en dépit d’une forte volonté internationale. Les pirates ont démontré ces dernières années une forte capacité d’adaptation et savent identifier les faiblesses des dispositifs mis en place. Leurs actions sont rapides, violentes et déterminées.
Plus que jamais, lorsqu’ils naviguent dans cette zone, en cas d’attaque les navires sont incités à appliquer les Best Management Practices (BMP) West Africa. À plusieurs occasions cette année, leur application a permis d’éviter le pire.
Malgré une baisse générale du nombre d’incidents liés à la piraterie et au brigandage maritime dans le monde, le MICA Center décrit une recrudescence d’autres facteurs d’insécurité ? Quels sont-ils et comment analysez-vous cette tendance à l’échelle globale ?
EJ : Si le GoG focalise l’attention en termes de piraterie et brigandage, d’autres zones sont exposées plus sévèrement à des problématiques que nous avons voulu mettre en avant cette année.
En zone Asie du Sud-Est par exemple, les navires marchands sont certes exposés à des actes de brigandages en particulier dans le détroit de Singapour mais ils font aussi face de manière préoccupante à une augmentation des activités de contrebande. En zone Amériques et arc des Caraïbes ils sont majoritairement confrontés au problème de narco-piraterie. Les phénomènes migratoires et la pêche illicite, non déclarée, non réglementée affectent désormais quasiment toutes les zones.
Ces tendances régionales mais croissantes sont probablement liées à des situations économiques affectant les moyens de subsistance des ressortissants locaux qui se tournent vers les trafics illicites pour survivre.
Cette année, le bilan du MICA Center s’est une nouvelle fois étoffé, autant sur la forme que sur le fond. Quelles sont les principales nouveautés apportées dans le cadre de la publication de cette 3ème édition ?
EJ : Cette année il a été décidé de mettre en perspective les données liées à la piraterie et au brigandage avec l’ensemble des facteurs d’insécurité maritime dans le monde. Pour y parvenir nous avons fait appel à quatre grands centres régionaux d’information maritime partenaires ainsi qu’à ceux qui nous accompagnent toute l’année au travers de leurs évaluations sécuritaires périodiques et particularisées, les états-majors des commandants français de zone maritime. Chacun nous a fait part ainsi de son expertise régionale et a mis en relief ses préoccupations qu’il partage ainsi avec nos lecteurs.
Armateurs de France se tient aux côtés de ses adhérents et collabore activement avec la Marine nationale et le MICA Center, au travers des rencontres semestrielles Marine-Armateurs et l’organisation de réunions thématiques.
Ces évènements sont notamment l’occasion de partager des retours d’expériences et participent au développement de meilleures pratiques, ainsi que de nouvelles synergies.
1 Maritime Information Cooperation & Awareness Center
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